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POESIES

 

de Robert Naggar

 

 

INTRODUCTION

 

J’ai donc quatre-vingts ans !

Cela m’étonne, me surprend.

Comment en suis-je arrivé là ?

C’est vraiment stupéfiant !

Dois-je en rire ?

Ou en pleurer ?

Dois-je m’en réjouir

Ou bien me lamenter ?

C’est comme ça, c’est un fait !

Alors plutôt en rire

Que de s’en désoler !

Devrais-je me taire, me faire petit ?

Ou me distraire, profiter de la vie ?

M’accompagnerez-vous dans mes illusions ?

M’abandonnerez-vous à mes divagations ?

Quoi qu’il en soit,

Quel que soit votre choix,

Je danserai, je chanterai, j’invoquerai Belzébuth,

Tant que le sang coulera dans mes veines,

Je ferai mille culbutes

Pour prouver que quatre-vingts ans

C’est une seconde jeunesse

Et l’expérience aidant,

On en goûte mieux l’ivresse.

Trêve de blablas, de boniments,

Allons-y, voyons comment

Vivre gaiment ces quatre fois vingt ans.


 

JE SUIS TOUJOURS LÀ !

 

Prudemment, j’ouvre un œil

Sur ce jour nouveau

Qui sourit et m’accueille.

Suis-je donc toujours là ?

Est-ce bien encore moi ?

Je regarde, je tâte, j’ausculte

L’objet de mon inéluctable culte :

Mon corps, ce frère que je ne peux quitter,

Qui semble toujours vaillant, encore entier.

Cet étrange moi-même, souvent me comble

Mais vieillit malgré lui et parfois m’encombre.

Il partage ma vie depuis quatre fois vingt ans ;

Je ne peux m’en défaire, même en essayant.

Ils ont bien de la chance nos amis les serpents

De faire des liftings ! Rajeunissent en muant !

De mon être physique, je fais vite le tour :

Le moteur cérébral est actif, tourne toujours,

Le cœur bat, régulier, en cadence ;

A l’écouter, il est gai, il danse.

Les jambes croisent, les orteils obéissent,

Les poumons respirent, les doigts réagissent,

Le dos se cambre…aïe, il grince, le félon

Le punirai plus tard d’un coup de talon.

Les yeux voient, même si vaguement ;

Je chausserai mes lunettes à un autre moment.

La tête est indolore, la langue toujours vaillante.

Une bonne journée s’annonce, j’apprécie et je chante

Ce corps qui est mien, que je respecte, qui m’enchante.

Il a vu, avec moi, près de trente mille jours

De joies, de larmes, de rires et d’amour.

J’en prends soin, l’entretiens, l’adore ;

Avec lui je danserai et rirai encore.

Sera à mes côtés pour boire jusqu’à la lie

Cette folle équipée, cette merveille qu’est la vie.


 

 

NOUS, OCTOGENAIRES

 

Nous, octogénaires,

Savons tout de la vie.

Qui ose dire le contraire ?

Qu’il se montre, l’impie !

Vous, jeunes, courez comme des débiles,

Faites en vitesse mille choses inutiles.

Nous sommes maintenant bien plus patients,

Ce que nous faisons est plus intelligent.

Vous suggérons donc d’ouvrir vos oreilles,

De nous écouter, de suivre nos conseils.

Pour vous, sommes-nous trop lents ?

Dépassés, d’un autre temps ?

Considérez un instant :

Peu de choses ont changé

Depuis la nuit des temps.

 En les millions d’années

Qu’hommes et femmes font des enfants

Ils les font encore et toujours en s’aimant.

Ils mangent, boivent et rêvent en dormant,

L’amour fait toujours la pluie et le beau temps.

Malgré notre expérience maintenant millénaire,

Nous n’avons pas appris que paix vaut mieux que guerre.

Internet et Facebook sont une révolution ?

Ne sont finalement que modes de communications.

Où sont donc ces changements si profonds

Que des humains, ils ont changé le fond ?

Nous vous conseillons donc de bien nous écouter,

Evitant les bêtises que nous-mêmes avons faites,

Car, avant vous, il nous faut bien l’avouer,

 Comme les générations qui nous ont précédées,

Nous n’avons pas voulu écouter nos ainés ;

Mais lorsqu’à l’âge mûr nous sommes arrivés,

Nombre d’entre nous ont bien dû confesser :

« Mon père avait raison, il fallait l’écouter ! »

Vous n’en avez rien à faire ?

Voulez vivre à votre manière ?

C’est normal même si c’est bête

De n’en faire qu’à votre tête.


 

 

LES VIEUX CONS

 

Certains jeunes le diront,

D’autres le penseront,

C’est clair, sans discussion,

Tous les vieux sont des cons !

Mais si ces vieux,

Aussi nuls soient-ils,

Ne s’étaient pas vautrés,

Les débiles,

Dans le stupre et la fornication,

Dont les blancs becs

Vantent les délices et la délectation,

Si les vieux donc, ne s’étaient pas,

Entre vie et trépas,

Foutus à poil, roulés des pelles,

Léchés les coins sombres,

Tatouillés les aisselles,

Tous ces blancs becs,

Aussi malins soient-ils,

N’auraient jamais, à leur tour,

Titillés leurs contours

Ni, c’est sûr, sans discours,

Jamais vus la lumière du jour !

 

 

 

 

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